Chérie, j’ai rétréci ton salaire… et ton temps de travail, et ta retraite, et ton temps libre

ça nous interesse

7 mars 2024

Chaque année, le 8 mars est l’occasion de célébrer la Femme. Et si cette journée est bien plus suivie et commentée que son équivalent masculin (si, si, rendez-vous le 19 novembre pour la Journée internationale de l’homme), c’est bien que l’on cherche à cacher quelque chose. Enfin, cacher est un bien grand mot : nul besoin de s’aventurer trop loin pour constater qu’hommes et femmes ne sont pas encore égaux, loin s’en faut.

Au travail, le constat est particulièrement amer, n’est-ce pas mesdames ? D’ailleurs, les chiffres sont là si vous estimez devoir justifier votre prochaine augmentation et essayer de rejoindre vos collègues masculins. Saviez-vous par exemple qu’à poste et temps de travail équivalents en 2023, une femme perçoit en moyenne un salaire inférieur de 5,3 % à celui de leurs confrères masculins : oui, vous touchez un salaire réduit par rapport à votre collègue qui vient de prendre sa 8e pause café de la matinée et c’est absolument normal.

Vous en voulez encore ? Si l’on fait une moyenne générale, cette différence atteint même les 22,3 % en défaveur des représentantes du « sexe faible » et les temps partiels sont bien plus souvent attribués aux femmes : 26,7 % des salariées connaissant cette situation contre seulement 7,5 % des hommes salariés. Dans tous les cas, la vie au bureau (ou à l’usine ou ailleurs encore) vous est défavorable pour un fait simple : vous êtes née femme.

Des inégalités à tous les niveaux

 Comment expliquer ces inégalités qui ne semblent être liées à un simple chromosome ? Les plus féministes d’entre vous me répondront à coup sûr « c’est de la faute aux hommes, encore ! », ce à quoi je vous répondrais que ce n’est pas tout à fait juste (du moins, ce n’est pas le seul élément explicatif).

Selon Ipsos, près de deux tiers des femmes âgées de 18 à 25 ans estiment devoir mettre leur carrière entre parenthèse un jour ou l’autre. Plusieurs points expliquent ce phénomène, dont la vie de couple et la naissance d’un enfant, mais ce serait oublier que nous faisons face à une nouvelle génération dont les objectifs ne sont plus les mêmes. Pour la nouvelle vague, il s’agit avant tout d’associer travail et passion, en limitant le stress et en trouvant l’équilibre entre vie active et vie privée.

Viennent ensuite les interprétations traditionnelles qui veulent que madame s’occupe de la marmaille pendant que monsieur se doit de pourvoir au bien-être de sa famille : une charmante excuse qui semble encore bien fonctionner. Si l’on est capable d’envoyer une fusée dans l’espace, on éprouve encore toutes les peines du monde à trouver un équilibre entre les hommes et les femmes dans le cadre de la parenté et des tâches ménagères. Ajoutez à cela les horaires des crèches et écoles qui semblent pensés pour vous nuire ou encore la merveilleuse faculté qu’ont les enfants de tomber malade un jour sur deux et vous avez la recette de la bonne vieille « femme au foyer » ou du moins de l’emploi à temps partiel.

Pourtant, un minimum de réflexion amène de plus en plus de femmes à se tourner vers leur moitié affalée devant la télé et à lui faire part d’une fulgurance : « pourquoi est-ce que c’est moi qui doit m’occuper exclusivement du petit ? ». Amusez-vous à poser la question à votre homme et regardez-le pâlir à mesure qu’il se rendra compte que ses arguments ne pèsent en vérité pas bien lourd pour se dédouaner, surtout avec le renforcement du congé parental à destination des pères et autres actions menées pour lui rappeler qu’il s’agit (normalement) de ses enfants également. Voilà donc une piste à creuser pour atteindre la parité au travail et ce n’est pas encore fini, croyez moi.

Tu seras une femme, ma fille !

 Mesdames, si je vous dis que vous êtes (quasiment) les seules responsables de cette situation, vous me croirez ? Depuis bien longtemps, on sait que derrière chaque « grand homme » se cache une femme qui fait le travail dans l’ombre sans demander aucun crédit : il est temps de réclamer votre dû !

Tout commence durant l’enfance puisque le traitement dans l’éducation change en fonction du sexe de l’enfant, et nous ne parlons pas que du choix des couleurs des vêtements : combien de livres ou de jouets continuent de présenter l’image de « Maman s’occupe des enfants et Papa travaille » ? Et les femmes elles-mêmes ont tendance à reproduire cette image en poussant les petits garçons à se dépasser tandis que les petites filles doivent être gracieuses. Kevin sera le prince courageux qui devra affronter le dragon tandis que la princesse Léa… se contentera d’attendre sagement qu’on ait besoin d’elle.

Au-delà d’un changement structurel de grande ampleur qui doit permettre à tous de se rendre compte de l’injustice de la situation actuelle, la clé pourrait bien être les femmes elles-mêmes. Sortir des stéréotypes anachroniques, expliquer aux générations futures qu’elles peuvent réclamer plus et faire appel à leur talent pour réclamer une égalité de fait (en attendant de renverser la tendance totalement), c’est un travail qui doit s’amorcer dès aujourd’hui. Si vous êtes l’heureuse mère (ou père, puisque les hommes aussi doivent jouer leur rôle après tout) d’une petite fille, oubliez les cadeaux stéréotypés et les phrases toutes faites : poussez-la à en vouloir toujours plus et à ne pas se laisser faire.

Stéphanie HECQUET

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