La macronite, une maladie dégénérative de la relation – par Rami Kechteil

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20 décembre 2018

Quelle que soit son analyse des actions de notre président et de leurs résultats présents ou futurs, chacun le constate, la relation entre le chef d’État et une large majorité des citoyens est dégradée, disons malade. D’ordinaire, l’affection constatée, très répandue, perturbe la liaison entre la tête (le chef) et le corps (électoral). Elle peut frapper n’importe où, dans une entreprise, dans votre équipe. Partout, elle provoque la même paralysie générale de l’organisme. Heureusement, les mesures de prévention sont efficaces.

Quand une relation est malade, d’instinct, nous cherchons un coupable, au moins un responsable : le mari ou la femme, le maître ou l’élève, le dirigeant ou son collaborateur… en oubliant un troisième terme, la relation, pourtant parfois seul en cause.

Ça ne va pas entre nous. Tu es correct et je suis correct, je suis un père acceptable et tu es un fils convenable, je suis un pédagogue averti et toi un élève doué, je suis un responsable apprécié et toi un collaborateur souvent félicité, mais ça ne va pas entre nous, pas du tout… c’est la relation entre nous qui n’est pas bonne, seulement la relation, ni toi ni moi…

Peut-être cette relation est-elle atteinte de macronite ?

Les symptômes de cette maladie ont été bien identifiés.

Le dirigeant est perçu comme distant, arrogant, hors-sol. On dit qu’il n’écoute pas ses collaborateurs, ne les entend pas, ignore tout du terrain… Il ne comprend rien !

Le collaborateur est jugé récalcitrant, réfractaire aux efforts indispensables, sans intelligence de la situation globale… Il ne comprend rien !

Une fois une relation atteinte de macronite, il est très difficile, sinon impossible, d’éradiquer la maladie. Mieux vaut prévenir…

Quelques simples mesures de prophylaxie peuvent limiter les risques. Mentionnons deux de ces pratiques sanitaires. Il appartiendra au responsable de les mettre en œuvre : il est aussi responsable de la santé de relation entre lui et ses collaborateurs, quels qu’ils soient.

  1. Voir et montrer qu’on a vu

Un instituteur ne laisse passer aucune faute d’orthographe (en réalité des erreurs). Un responsable doit voir ce qui ne va pas, corriger les écarts, amender les comportements inadaptés… Certains s’appliquent à démontrer que rien ne leur échappe. J’ai l’œil se félicitent-ils, assurés d’impressionner leur monde. Leurs collaborateurs, eux, accusent la cécité de tels managers : il ne se rend pas compte, il ne voit pas tout ce qu’on fait…

La macronite a frappé !

Pour l’éviter, le manager voit et montre qu’il a vu aussi le positif, ce qui est bien fait, chacune de ces initiatives souvent discrètes qui fondent la performance. Il en parle (pour montrer qu’il a vu), félicite.

Son manager à une rédactrice débutante : « j’ai lu le dernier écho que tu as écrit. Je tiens à te féliciter. Tu progresses rapidement. Ainsi, tu as écrit “ils partagent le café” et non “ils boivent le café ensemble”. J’apprécie. Ça change tout. À lui seul, le seul mot “partage” en dit plus sur l’ambiance qu’une longue phrase ». La rédactrice rougit. « C’est vrai, j’étais contente quand j’ai trouvé ce mot ». Et sitôt le manager éloigné : « alors lui, lui, il a vraiment le coup d’œil. Rien ne lui échappe. Il s’intéresse vraiment à mon travail ».

  1. Écouter, entendre et montrer qu’on a entendu

Nous écoutons, nous entendons nos collaborateurs ? Alors, montrons-le !

À son manager qui lui reproche ses étourderies, une assistante fait observer.

– Le plateau du back-office est très bruyant. Chacun parle, rit, discute… C’est très difficile de se concentrer.

– Oui mais tu es payée pour ça. Tu dois de concentrer sur ton travail.

– Oui mais…

Ça y est… La relation est frappée de macronite. L’assistante pense que son manager ne prend pas en compte ses observations, ni même ce qu’elle vit, les difficultés de son travail. Et le manager s’exaspère : l’assistante ne considère pas ses attentes, ses exigences…

Le manager aurait prévenu la macronite en prenant acte des observations de l’assistante.

– C’est vrai, réellement vrai. Le plateau est souvent très bruyant. Il y a ceux qui crient au téléphone et ceux qui papotent et rient aux éclats pendant que d’autres travaillent. C’est la réalité. Et c’est pourquoi je te demande de faire un effort de concentration supplémentaire, pour surmonter toutes ces difficultés. Je sais que tu peux le faire.

Assurée que son manager prenait la mesure des difficultés de son travail, de l’effort nécessité, l’assistante aurait redoublé de vigilance pour éviter les étourderies…

Ces deux pratiques sanitaires ne sont pas miraculeuses. Seulement utiles. Bien d’autres sont imaginables, bien d’autres soins préventifs à prodiguer à ses relations de travail pour préserver leur vitalité.

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